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La capacité de support d’un milieu naturel a ses limites

Julien Cabana julien.cabana@quebecormedia.com

Il existe une loi non écrite dans la nature qui implique que dans un secteur donné, il ne doit pas y avoir plus qu’un certain nombre d’individus composant une population, que ce soit dans un lac ou en forêt. C’est ce que l’on appelle la capacité de support du milieu.

Les biologistes ont toujours mis de l’avant cette notion dans leurs travaux au fil du temps. Parfois, il faut prendre des décisions qui peuvent paraître difficiles à comprendre pour certaines personnes, mais qui, au fond, rendent service tant au milieu naturel qu’à la population d’animaux qui sont sur ce territoire.

Dernièrement, on apprenait que le gouvernement avait autorisé le prélèvement d’un certain nombre de cerfs de Virginie dans deux parcs nationaux. Selon les experts, la densité idéale pour que tout se passe bien, tant pour le milieu que pour les cerfs, est de cinq bêtes au kilomètre carré. C’est la situation optimale.

Selon le dernier inventaire fait l’hiver dernier, dans le parc national des Îles de Boucherville, il y avait 436 cerfs, soit une augmentation de 42 % de la population par rapport au dernier inventaire réalisé deux ans plus tôt.

Cette densité représente huit fois plus que ce que peut supporter le territoire.

Dans le cas du parc national du Mont Saint-bruno, l’inventaire de l’hiver dernier a indiqué que 353 cerfs habitaient le site, une augmentation de 119 % par rapport au dernier inventaire, deux ans auparavant. Ce nombre de bêtes représente cinq fois plus au kilomètre carré que ce que le territoire peut supporter.

Si on tient compte du taux de reproduction du cerf, la femelle pouvant mettre bas, dès sa première année, de un à trois jeunes, ces populations pourraient exploser. Les milieux naturels ne peuvent tout simplement pas supporter une telle population très longtemps, surtout en matière de nourriture.

HIVERS CLÉMENTS ET EXEMPLES

Depuis quelques années, les hivers sont plus cléments au Québec. Cette situation profite énormément à la population de cerfs qui explose un peu partout sur le territoire. La répartition par région n’est pas uniforme, ce qui explique que les chasseurs de certaines zones sont dans l’abondance alors que d’autres voudraient des mesures pour limiter le prélèvement.

Toutefois, au global, on peut dire que présentement, la population de cerfs de Virginie

est très élevée au Québec avec plus de 250 000 individus, excluant l’île d’anticosti.

Le phénomène du surbroutage a déjà été vécu ailleurs, pour d’autres espèces que le cerf. Par exemple, dans la réserve faunique de Matane, la population d’orignaux a tellement augmenté à un moment donné que ces bêtes étaient en train de détruire carrément leur milieu de vie. Des mesures ont été prises pour augmenter le prélèvement, ce qui fait qu’aujourd’hui, la situation est revenue à la normale.

TROP DE COMPÉTITION

On peut aussi examiner la situation du côté du caribou du Grand Nord québécois. Les spécialistes estimaient qu’il y avait un million de caribous sur le territoire, en additionnant les individus des différents troupeaux.

Rapidement, on s’est rendu compte que les caribous étaient plus petits, plus maigres et devaient parcourir de plus longues distances pour se nourrir. Le milieu n’arrivait plus à satisfaire à la demande d’une telle population. La maladie et la famine se sont installées, ce qui a entraîné une baisse draconienne de la population des différents troupeaux.

À l’île d’anticosti, la population de cerfs dépassait les 160 000 bêtes à un moment donné. Ils étaient plus petits et plus maigres, parce que leur nombre était trop élevé par rapport à la capacité de support du milieu naturel. Un hiver rigoureux est venu faucher plus de 40 000 cerfs. Ils n’avaient tout simplement pas la force de résister à la longueur et à la rigueur de cet hiver difficile.

On peut appliquer le même modèle à certains lacs de pêche où l’on ne capture que de la petite truite qui a plusieurs années. La raison est simple : il y a trop de compétition pour la nourriture disponible, ce qui les empêche de grossir.

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2023-11-21T08:00:00.0000000Z

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